mardi 11 mars 2014

10/3/14



à surfer l'existence de mes mots, j'avais trouvé dans la formule du blog, l'espace ideal pour mon esprit toujours perdu, un peu butineur, fatigable mais parfois éveillé concentré sur ce moi friable tant l'amer des Sargasses, cette mer dénuée de côtes, bordée de varech me faisait miroiter une matrice originelle si seyante à mon être en lambeaux.
Je vieillis. Mon énergie diminue, mes sens me trahissent et quand l'air à mes poumons se raréfie,  je suis rattrapé par les nuits sans sommeil d'une enfant que je veillais et mon impuissance d'hier à la voir haleter, ventoline à la main, dans cette scansion de mots chapelets : "pourquoi moi, jami, pourquoi moi"- "veux dormir" dormir" une heure un instant".

Le temps est un nappage passé-présent. Nous sommes plus que la mémoire  de nous-mêmes. Nous sommes la bande-son de tant d'errances. Ma focalisation sur mon vécu n'a rien d'étroit, d'égotiste. Il est tout sauf un enfermement, un nombrilisme cultivé. Il pointe même l'antipode. Un a-racinement, un état rhizome. Une a-filiation. suis perdu. Depuis l'origine. Sans comprendre, pouvoir comprendre combien cette perte était une chance. Nous naissons désarmé, a-culturé dans un état d'extrême fragilité et la naissance comme cataclysme nous propulse dans cet espace moins protecteur que la matrice où s'est peaufinée la gestation.
J'écris pour surnager, geste débridée.
 Il faudra accepter de sombrer.
Sombrer est le lot. Nous venons de l'eau et retournons à l'eau.
Nul drama, un constat. Je n'ai sur la vie que des questionnements. Nul savoir, nulle aspiration bien définie. Le bonheur n'a jamais était mon trip, ni la jouissance, ni l'appropriation et l'accumulation d'avoir.
 Mon langage a changé. La scansion est devenue brève. La concaténation des idées : aléatoires. Je garde en moi l'effondrement, la désagrégation.
L'usine recompose un langage, un univers. Comme la mort de l'être aimé recompose l'histoire de ce monde, la prégnance de ce monde, la signification.
Demosthéne lutta contre le bégaiement en mettant des pierres dans sa bouche. Ma bouche encombrée de sable sur la rive désertée. J'ai longtemps eu ce gout de sable qui me confia au silence. L'anomie est cette perte de sens. Etrange royaume.

Ma vie est devenue étrangement légère. Mais les mots ont changé de consistance. Je n'ai pas gagné en sagesse. Ma compréhension des choses de la vie sont devenues tactiles. Mon regard sur autrui n'a pas gagné en acuité. De ce point de vue j'opte pour le flou, laissant à l'autre le poids de son histoire, de ses actes et donc de ses dires.
Les deuils
sont pour chacun de précieux révélateurs. En fermant le caveau familial, le 18 juin 2013, je constatais que le corps de ma mère occupait l'ultime place. Le sentiment que ma place n'était pas parmi eux me dessina un sourire moqueur mais je ne savais trop si ces femmes et leurs hommes m'offraient un ultime clin d'oeil ou si la vie m'invitait à aller voir ailleurs. La mise à l'écart est un état premier réservé à mon être. Constat. Toute une enfance à arpenter ogni domenica ce "campo santo". Nettoyer le marbre, changer l'eau des fleurs putrescentes et tenir la main de la nonna, visage en larmes.
Je m'inquiète souvent du type de folie que je peux "offrir" à mes enfants en forme de transmission.
Un excès de liberté? Et peut être un sentiment irréfléchi que la quête d'un questionnement, d'une remise en cause, de puiser aux sources de la connaissance ne leur sont pas salutaires.
En refermant le marbre, ce jour-là s'est terminée mon histoire. Celle que d'autres avaient écrit pour moi, ce montage menteur où un "groupe" se fonde sur un faux témoignage pour vivre ensemble avec de faux sourires et haines contenues. Il faut dire, crier les folies tapies dans les cellules familiales, toutes ces rancoeurs. Nous demeurons mus par des inconscients aiguisés comme des couteaux et chacun prêt à sauver seulement sa peau. L'état de conscience est à conquérir. Mais c'est rarement compris comme un enjeu majeur.
Ma vie en couple avait explosé sans envol. Une méconnaissance mutuelle. Le quotidien avait laminé et le désir et la confiance. Les enfants avaient joué un rôle de ciment jusqu'au moment où la lézarde avait fendu le silence lourd. J'avais été bizarrement lucide et muet. Pourtant tout semblait si beau.
E la nave va

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