vendredi 17 avril 2009
agosto la fine di
Dans cette activité de soignant se poser la question de la pudeur devient un leitmotiv quotidien (je n'aime pas le mot récurrent trop pédant à mon gout, trop happy few). La pudeur est un théme qui implique chacun dans la continuité de l' existence. Dans ce face à face avec un patient, cela devient une question immédiate et presque permanente durant la durée du soin. Pour un homme dans ce monde où il est plus habituel de voir des femmes, la question est encore plus prégnante. L'uniforme blanc ne vous exonére pas de devoir énoncer à la personne qui vous fait face (quel que soit son sexe) si elle accepte votre présence dans cette intimité des corps. Cette question de la pudeur ne se réduit pas à une question sexuelle tant à ces moments, devant la douleur d'autrui, les pensées se fixent sur d'autres préalables. J'en viens souvent à penser que dans cette sphére du soin la pudeur a à voir avec le "corps souffrant".
Montrer son corps souffrant, être confronté au regard de l'autre (supposé bien portant) sur son corps alité! Voilà l'énoncé dont je garde la formulation muette chaque fois que j'entre dans une chambre, chaque fois que je cherche le regard de l'autre qui me fait face.
Chaque fois, tant les lignes peuvent fluctuer d'un temps à l'autre, l'ouvert se refermer.
Le regard curieusement est pour moi la clé, il est cette sphére de la première approche où l'autre se fait une idée de vous avant même d'avoir entendu votre voix. Je pense souvent à un éléve infirmier que je croise de temps à autre et qui prépare un mémoire sur le sourire. Nous discutons peu mais à l'observer je sais qu'il a tout pigé même si la notion de sourire mérite d'être étendue. à la question du visage (il y a quelques années les éditions autrement avait sorti un numéro de leur revue sur "le visage", interventions de philosophes, de sociologues et d'un chirurgien plasticien).
La scéne du "soin" a ce mérite extréme d'offrir des rencontres de dénuement.
C'est souvent le patient qui en fait les frais, expédiés comme un numéro de dossier, une pathologie classifiée en nombre de jours mais en retour c'est aussi la mise à nu de ceux qui interviennent dans le soin.
La question de la pudeur n'et pas une question de voile sur un corps, de pose d'un drap, d'une serviette mais de la maniére dont vous considérez celui qui est devant vous, du ton d'une voix, de l'attention, de la prise en considération que l'être qui est face à vous a une histoire faites d'épreuves, de savoir, d'expériences.
Car la question de la pudeur prend forme quand l'autre sent dans votre manière d'être cette dépossession de lui-même, de ce qui le constitue en tant qu'être pensant.
Me coltine depuis une semaine au refus d'une patiente. Je reprenais le service samedi dernier et faire connaissance à 7 h du matin a été un peu brutal. J'ai pressenti sur son visage l'inquiétude et à peine avais-je formulé l'alternative qu'elle opta pour ma collégue. Las nous étions deux hommes ce matin là, aussi nous trouvâmes "la collégue" dans autre service.
Depuis nous avons fait connaissance et la distance s'est restreinte mais en moi demeure le questionnement.
Il faut dire que j'ai beaucoup d'a priori. Je croyais que le rock and roll avait dissout à jamais
ces archaïsmes sur corps et nudité et puis le retour du religieux a insidieusement reconverti les anciennes pudibonderies. La liberté sexuelle s'est transformée en sa commercialisation à l'extrème, le corps marchandise fait partie de la spéculation à outrance, si bien que si vous venez à émettre l'idée saugrenue "pas d'amour sans amour" on vous prend (est ce bien le terme) pour un marsien. C'est étonnant cet écart entre les années 68 où le désir et la volonté des femmes (jeunes) à décider de leur vie de leur sexualité s'insurgeaient contre l'ordre moral , les diktats patriarcaux et le glissement depuis la fin des années 70 dans ce marketing triomphant mêlant vulgarité et sexe retournant les slogans de révolte "nous voulons tout tout de suite" dans cette idéologie sarkoziste avant l'heure de la jouissance consummériste à tout crin ( premières années canal plus, des fameuses radio libre sans parler des cauet et autres phénoménes d'aujourd'hui). Le langage de la marchandisation des corps a pris toutes ces tonalités mortiféres injurieuses où s'immisce la volonté de pouvoir de néantisation de l'autre.
Ce n'est pas un voile sur le corps qui indiquerait "la mesure" mais plutôt un baillon sur toutes les bouches qui n'éructent que des crachats. L'humour qui peut être aussi un apannage de la pudeur est vide de sens sur les ondes d'aujourd'hui (je pense à skyrock (sky c sur), et autres nrj etc). Le mot "cul" prononcé par Férré dans un temps guindé est cent fois plus détonnant que les blagues graveleuses d'un cauet mais ainsi est la vie. (je m'énerve, je le sens)
Désormais la mécanique des corps carbure dans des enchevêtrements même pas tantriques et sans grande imagination : il suffit de taper sex ds google pour que la machine cent balles.
Et si dans libé je trouve une annonce style "con cherche bite for the beat" me sentirai pas con/cerné d'ailleurs je ne lis pas libé!
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1 commentaire:
et bin dis donc...colère
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