dimanche 8 juin 2014

7 juin 2014



j’écrivais au jour le jour pour retisser des états de mémoire,
un travail quotidien entre éclairage et obscurité. 
La naissance m’avait lancé dans ce jeu aux règles mouvantes. 
Je jouais, vivotais découvrant chaque jour l’étendue d’une trame dont j’ignorais encore la finalité.

Avant le langage, dans ce temps du babillage, nous baignons dans cette animalité intuitive. L’enfant est hors du sens mais dans une faim d’essentiel dans cette excitation des sens livrés à la découverte. Le mot mère rencontre moins notre esprit que son odeur, la musicalité de sa voix. 
Le lien est un tissage de sons, d’intonations de voix, de chaleur de corps, de lait au sein donné. 
L’enfant n’est jamais dans un manque, il faudrait pour cela une expérience préalable, il est dans la découverte, dans tous les aspects de cette découverte. 
Caravelle-conquistador dans le flux temporel.
Le présent d’un enfant est une immédiateté où lui parviennent de nouvelles découvertes de lui et de l’autre. Son visage devient comme un langage plus que les cris, crêtes imprécises de tant d’orages plaisir-déplaisir. L’enfant baigne dans l’univers de son vis/e à vis/e. 
Dans le champ de ses névroses, de ses certitudes et de ses peurs. 
Le petit monde-adulte autour de lui, eden-purgatoire-enfer.

Je n’eus parait-il ni le sein ni le lait mais un parking pouponnière pour mes six premiers mois : en stand-by. Fis une chute du berceau? et bref séjour à l’hosto, revins à la pouponnière avec une cicatrice à l’arrière du crâne. Un jour, ma grand-mère se décida à me récupérer. 
Tout cela je l’appris par hasard dans ma trentième année. 
Ma tante et ma grand mère étaient décédées, mon beau-père et ma mère divorçaient. 
Mon esprit était à la dérive dans une autre tempête. 
Mon amie était morte dans sa vingtième année et j’avais si peu été à la hauteur de la rencontre que je ne cessais de me désagréger.
La culpabilité n’a pas le même gout quand elle est sans retour. 
Elle peut-être un alibi commode pour une litanie de la plainte. 
Elle exige la refonte des mots sur les maux. 
Je survécus sans résilience, mes neurones anonnant la faillite annoncée. 
Des êtres bienveillantes me tinrent,  tête hors de l’eau. 
N’en furent pas récompensées.

J’écris comme d’autres marchent. Je trébuche. Je reviens sur mes pas. 
Du 27 mars au 14 juin 2013 je restais au chevet de celle qui m’avait conçu. Ni par amour, ni par devoir peut être par curiosité. Il n’y a d’amour que dans la réciprocité et la re-connaissance. Là où il y a rejet reste la césure. La notion de pardon suggère une croyance. En l’occurrence la croyance était cet énoncé asséné avec la certitude plombée de l’adulte qui clame « je t’ai donné un nom ». Jeter-donner un nom : pas même pér-cuté. Dans cet économie d’un don, le donateur asservit le donataire. 
En refusais le jeu.
J’ai toujours eu en horreur cet édit mortifère. 
J’ai fermé ses paupières puis ai lavé son corps. 
Un ange m’a aidé à l’habiller. Un ange m’a aidé, de sa simple présence accompagnant mes gestes, les arrimant, à m’épargner effondrement et irréalité. 

De n’être pas seul à ce moment m’ancre que j’y étais.

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